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Quand Rousseau était confiné à Gênes

En août 1743, le bateau qui emmenait Rousseau à Venise ne put quitter le port de Gênes : face à la peste de Messine, une période de quarantaine est imposée aux Génois. Le confinement n’effraie pas le philosophe, qui confie : "Je n’ai jamais connu l’ennui, même dans le plus parfait désœuvrement : mon imagination, remplissant tous les vides, suffit seule pour m’occuper” (Les Confessions, livre II, chapitre 12). Il nous raconte son confinement.

Jean-Jacques Rousseau (Crédits : Georgios Kollidas - Adobe Stock)

« C’était le temps de la peste de Messine. La flotte anglaise y avait mouillé, et visita la felouque sur laquelle j’étais. Cela nous assujettit en arrivant à Gênes, après une longue et pénible traversée, à une quarantaine de vingt-un jours. (...) Je fus conduit dans un grand bâtiment à deux étages absolument nu, où je ne trouvai ni fenêtre, ni table, ni lit, ni chaise, pas même un escabeau pour m’asseoir, ni une botte de paille pour me coucher. (...) Comme un nouveau Robinson, je me mis à m’arranger pour mes vingt-un jours comme j’aurais fait pour toute ma vie. J’eus d’abord l’amusement d’aller à la chasse aux poux que j’avais gagnés dans la felouque. (...) Je procédai à l’ameublement de la chambre que je m’étais choisie. Je me fis un bon matelas de mes vestes et de mes chemises (...) j’arrangeai en manière de bibliothèque une douzaine de livres que j’avais. Bref, je m’accommodai si bien, qu’à l’exception des rideaux et des fenêtres j’étais presque aussi commodément à ce lazaret absolument nu qu’à mon jeu de paume de la rue Verdelet. (...) Entre mes repas, quand je ne lisais ni n’écrivais, ou que je ne travaillais pas à mon ameublement, j’allais me promener dans le cimetière des protestants, qui me servait de cour, ou je montais dans une lanterne qui donnait sur le port, et d’où je pouvais voir entrer et sortir les navires. »

Source : Jean-Jacques Rousseau, Les Confessions, livre II, chapitre 7, (1782).

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