L'infiltré : Les enfants de la politique

L'infiltré : Les enfants de la politique

Dans cette campagne à nulle autre pareille où tout a son importance sauf les idées, il fallait bien que les enfants s’en mêlent.

Dis-moi quel père tu es, je te dirai quel président tu seras…

Lors de la campagne des primaires, Alain Juppé avait déjà fait les frais de révélations embarrassantes lorsqu’une journaliste avait révélé que son fils se plaignait de ne pas avoir beaucoup vu son père : « C’est vrai que le dimanche de 11 h 18 à 12 h 12 c'était notre moment et après c’était fini, il allait bosser. »

Or, les politiques sont des hommes et des femmes comme les autres. Ils ont besoin de l’amour de leurs enfants, de leur affection, de leur présence à leurs côtés.

C’est ce qui a conduit Bruno Le Roux a sa perte. Lui qui rêvait depuis le premier jour du quinquennat de devenir ministre, faisant contre mauvaise fortune bon cœur en jouant au surveillant général de la classe socialiste pendant quatre ans et demi, s’est vu démissionné en 36 heures pour avoir offert à ses filles la possibilité de passer leurs étés à ses côtés à l’Assemblée nationale.

Le Président de la république qui ne s’embarrasse pas de sentiments paternels quand il s’agit de politique (Ségolène confirme) a tranché sans états d’âme.

Démissionner Le Roux, c’était le moyen pour lui de mettre Fillon devant ses responsabilités.

« You’re fired ! », comme aurait dit Donald Trump dans « The apprentice ». Et Bruno Le Roux a pris sa place dans le cortège des bannis, des proscrits, des enfants perdus du hollandisme.

Peine perdue : cela n’a rien changé à la détermination de François Fillon, plus forcené que jamais.

Lui, au moins peut compter sur le soutien indéfectible de ses enfants, un soutien sonnant et trébuchant. Comme si dans la famille Fillon l’obligation d’assistance alimentaire était inversée, on apprit le jour même de la démission de Bruno Le Roux que la fille, Marie, après avoir payé son mariage, avait aidé son père à payer ses impôts. Charmante enfant…

C’est sans doute dans le même esprit de solidarité fiscale que Marine Le Pen s’était rendu aux impôts pour accompagner son père.

Grâce soit rendue au redressement fiscal dont ils font tous les deux l’objet car cela permit au père et à la fille de se revoir enfin. Dans les grandes familles françaises c’est bien connu, on se serre les coudes dans les moments difficiles et on se retrouve toujours au cimetière ou devant le fisc.

Heureusement que la solidarité filiale n’est pas que financière. Plutôt qu’un avis d’imposition, on raconte que Benoit Hamon garde précieusement dans la poche de sa veste le petit mot de sa fille « Vas-y papa, tu vas tous les ratatiner ! ».

C’est son gri-gri, son porte-bonheur, celui qu’il serrait dans sa poche au moment de rentrer sur la scène de Bercy dimanche dernier, comme un boxeur qui livre son combat le plus décisif.

Avec sa vieille blouse d’instituteur à la retraite, avec ses gros yeux et son air d’apprendre encore par cœur les départements français, Jean-Luc Mélenchon a passé l’âge de ses enfantillages.

Lors du débat de lundi dernier, il avait l’air de prendre tous les autres de haut et, en vérité, il était largement au-dessus du lot. Quand il interrogea le plus jeune des candidats sur la loi El Khomri, il ne lui manquait plus que la règle en bois. 

« Elève Macron, au tableau ! » A ce moment-là, l’autre avait l’air un peu perdu et dû se résoudre à reconnaître que oui, il n’avait pas bien révisé ce point de son programme.

On se souvint alors du débat de l’entre-deux-tours entre Mitterrand et VGE en 1981 au cours duquel le candidat socialiste de l’époque avait renvoyé le président sortant avec cette formule : « Je n’aime pas beaucoup vos façons de me poser des questions. Je ne suis pas votre élève et vous n’êtes pas mon professeur. »

Le petit Emmanuel aurait pu avoir cette présence d’esprit, il ne l’a pas eu et on resta en fin de compte sur cette appréciation : « A de grandes capacités mais peut mieux faire. »

Finalement, l’élection présidentielle reste par-delà les années, encore et toujours un examen de passage. Le succès dimanche dernier de l’émission « Au tableau ! » qui mettait en scène des enfants de CM1 interrogeant les candidats le prouve.

Rien de tel que l’enceinte d’une salle de classe pour mettre à nu définitivement nos prétendants.

Dans sa quête d’une transparence totale, la société du spectacle avait trouvé là son idéal secret car qui d’autres que les enfants pouvaient faire accoucher de la vérité.

C’est bien connu, on ne ment jamais à un enfant. Tous les parents vous le diront : ils disent toujours la vérité à leur progéniture.

Après les confidences recueillies sur canapé par Karine Le Marchand, les interrogations des enfants se transformant en professeur des candidats ouvraient la voie à d’autres émissions de « politique-réalité » qui raviraient à n’en pas douter petits et grands...

On rêve maintenant d’un Kho-Lanta spécial présidentielle pour apprécier la capacité de résistance des candidats, leur sens de la stratégie et leur courage quand il s’agit de manger des chenilles, toutes qualités dont ils devront savoir faire preuve dans l’exercice du pouvoir.

A ce titre, François Fillon ne serait sans doute pas le plus mauvais, à condition qu’on lui offre le maillot de bain !

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