L'infiltré - Faut pas nous la faire !

L'infiltré - Faut pas nous la faire !

Cette semaine l'infiltré s'interroge, avec un certain cynisme, sur le "renouvellement de la vie politique", tant loué ces dernières semaines. Il revient aussi sur le naufrage du PS et sur les conséquences que cela va entraîner pour l'avenir de Solférino et des permanents politiques qui y travaillent... 

Il y a chez les nouveaux laudateurs du pouvoir, futurs députés ou nouveaux ministres, un enthousiasme rafraîchissant, une naïveté presque attendrissante, des mots qui font plaisir à entendre.

À moins que ce ne soit un soupçon d'hypocrisie...

À les écouter, c'est comme si on avait changé d'époque, comme si rien n'était comme avant, comme si la politique ne serait plus jamais la même, depuis Jupiter.

Pourtant, quelques indices nous laissent à penser que le vieux monde se refuse à mourir et que les réflexes de toujours sont encore là. Prenons le cas de François Bayrou.

À observer le comportement du ministre de la Justice, on a parfois l'impression que l'Histoire bégaie, comme si la vieille politique refusait de sortir de son corps.

Mis en cause dans une affaire judiciaire, il fait comme si de rien n'était, en rappelant simplement la jurisprudence dite Jospin qui veut qu'un ministre démissionne seulement quand il est mis en examen. Où est le problème ? 

Quand un journaliste va vraiment trop loin, il utilise son téléphone de ministre pour faire pression sur sa rédaction. Si on ne peut plus donner son point de vue sur l'actualité quand on est citoyen...

Ne reconnaissant que l'autorité émanant de Jupiter (et encore, ce n'est pas certain...), il met en cause publiquement la parole du Premier ministre, à la façon d'un Jean-Pierre Chevènement mais sans toutefois démissionner. Si on n'est plus libre, à quoi sert d'avoir accepté d'être ministre...

Pour moins que ça, certains ont été virés séance tenante, du temps de François Hollande. Mais ça c'était avant... au temps de la vieille politique...

Mounir Mahjoubi, le secrétaire d'Etat à l'Économie numérique, incarne bien l'état d'esprit de cette nouvelle génération qui, impatiente à l'idée d'exercer le pouvoir, pense qu'avec elle, qu'avec eux, rien ne sera plus comme avant.

Il tire sans doute son enthousiasme de son unique fait de guerre électoral : l'élimination dès le premier tour de Jean-Christophe Cambadelis, le premier secrétaire d'un Parti socialiste déjà à la dérive et désormais en faillite.

Au siège du Parti, le temps viendra du devoir d'inventaire et de l'introspection collective, peut-être même (qui sait...) de l'analyse politique de ces 15 dernières années.

Mais, pour l'instant, me confiait cette semaine un membre de la direction, c'est la situation financière qui prime.

Jean-Christophe Cambadelis, ci-devant député du 19ème arrondissement, doit se transformer de toute urgence en agent immobilier et trouver un locataire pour la moitié du bâtiment de la rue de Solférino.

C'est la condition indispensable pour pouvoir financer le licenciement, dans le strict respect des clauses de leur contrat de travail, les permanents politiques qu'on ne pourra plus payer à la rentrée.

Quel naufrage...

Nous sommes tellement nombreux à avoir rêvé d'accrocher le scalp du patron du PS au dessus de notre cheminée que M. Mahjoubi peut bien être notre héros du moment.

Et pourtant, en l'entendant cette semaine annoncer qu'En Marche ! allait remettre "de la vie et du débat à l'Assemblée nationale", nous avons trouvé que l'intéressé en faisait peut-être un peu trop...

Pardon de vous contredire, Monsieur le Ministre, mais on voudrait avancer l'hypothèse, certes audacieuse, que la vie existait avant vous.

Quant au débat, il est possible qu'il s'impose à vous plus vite que vous ne le pensez car quand on est à la tête d'une telle majorité, le problème n'est pas de l'alimenter mais plutôt de le maîtriser.

Un groupe parlementaire a ceci de commun avec une classe d'école qu'il faut récompenser ses plus brillants éléments, punir les plus turbulents et faire travailler tous les autres.

Il n'est pas certain que ce soit en dépossédant le Parlement de ses prérogatives et en légiférant par ordonnances qu'on parvienne à occuper tout ce petit monde. Mais ça c'était sans doute vrai avant...

Décidément, il faudra à cette majorité bien plus que des contre-pouvoirs : des dénonciateurs d'imposture, des débusqueurs de tartuffes, des contempteurs d'hypocrites.

Mélenchon appellerait ça des vigies démocratiques. Soyons plus modestes : essayons de leur rappeler simplement de temps en temps qu'il "faut pas nous la faire"...

Sur ce, je vous laisse car il faut que je fasse mes cartons.

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