Télétravail : les bonnes pratiques

Télétravail : les bonnes pratiques

Pendant cette période de confinement, le travail s’est mû, pour beaucoup de Français, en télétravail. Une mutation qui peut apparaître difficile lorsque les bonnes pratiques ne sont pas connues et appliquées. Les managers ont ici un rôle clé à jouer. Pour Émile, Adrien Boulogne (promo 17), chef de projet télétravail chez Malakoff Humanis et co-fondateur de la startup heyu, nous livre ses pistes et conseils pour que le travail à la maison se déroule dans les meilleures conditions.

Crédits : Shutterstock

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Comment parvenir à maintenir efficacement une séparation de la vie privée et de la vie professionnelle lorsque les deux milieux se mélangent ?

Il est essentiel de fixer des règles dès le début pour ne pas se laisser envahir par les habitudes spontanées. Définir des horaires de travail, pour la famille, mais aussi pour son équilibre personnel est une règle très utile. Cela peut par ailleurs permettre d’éviter le surinvestissement.

Je pense que continuer à avoir une hygiène de vie telle que celle que l’on a hors période de confinement est une bonne manière pour maintenir un cadre. J’entends par là abandonner le pyjama du matin pour s’habiller autrement, par exemple, ou encore ne pas travailler sur le canapé. Et enfin, un élément de pédagogie pour les enfants, je conseille d’expliquer ce que l’on fait au travail, c’est d’ailleurs une bonne occasion pour expliquer son métier à ses enfants, de manière à les aider à comprendre la nécessité de ne pas vous déranger pendant les heures dédiées.

Si cela peut paraître anodin, ces règles contribuent à créer un cadre pour soi et pour son entourage, et donc à limiter l’imbrication des sphères privées et professionnelles.

Comment maintenir une dynamique d’équipe et un esprit collaboratif sans rapports sociaux entre les travailleurs ? 

Je pense que ce confinement est étonnement une formidable occasion pour tisser du lien au sein des équipes malgré la distance. On aperçoit que le café digital informel se développe de plus en plus au point de devenir une norme. Les outils tels que Teams, Zoom (et bien d’autres !) sont de plus en plus utilisés dans les entreprises.

Je pense que les managers doivent organiser plusieurs fois par semaine des réunions virtuelles avec les équipes pour maintenir le lien. Finalement, au-delà de la planification de l’activité, c’est un moyen de mieux se connaître, de prendre des nouvelles du salarié d’une autre manière. J’observe que beaucoup d’initiatives collaboratives se développent dans les entreprises et sur les réseaux professionnels, comme par exemple des concours de dessins d’enfants des collaborateurs ou encore de photos des collaborateurs quand ils étaient enfants.

En somme, il est essentiel de garder ce lien informel, voire de le développer. Cela servira l’activité professionnelle bien plus qu’on pourrait le supposer. Pendant, comme après le confinement !

Dans quelle mesure le manager doit-il adapter son travail et sa méthodologie en période de télétravail ? 

Le manager est l’élément charnière de la poursuite de l’activité et du maintien du lien au sein de l’équipe. Il doit apprendre, ou en tout cas développer sa capacité à déléguer, à faire confiance. Et cela passe en partie par un mode de travail par objectif. Il n’est pas envisageable d’appeler toutes les heures son collègue pour savoir s’il travaille de manière effective. En revanche fixer des objectifs clairs, avec des points d’avancement réguliers, permet d’avancer collectivement. C’est en cela que le télétravail permet de développer la confiance. Bien sûr le prérequis est l’exemplarité du manager ; il doit faire confiance à ses équipes et savoir déléguer.

Dans un contexte sanitaire induisant un confinement tel que celui que nous connaissons aujourd’hui, quelles sont les mesures particulières à prendre par rapport à l’organisation du télétravail en temps normal ?

Tout d’abord, la priorité est de pérenniser l’activité. Un plan de continuité est nécessaire et il implique, plus encore dans le secteur tertiaire, de mettre à disposition des solutions techniques pour travailler à distance quand c’est possible.

Certaines entreprises ont mis en place pour les salariés qui n’ont pas d’ordinateur portable professionnel une solution nommée BYOD (Bring Your Own Device). Elle permet, via un système de connexion sécurisé, d’utiliser de nombreux outils de l’entreprise sur son ordinateur personnel.

La pérennité de l’activité est essentielle et c’est pour cela que cela doit être la priorité numéro une de l’entreprise en ce moment.

Aussi, même si cela semble évident, permettre le travail à distance permet de limiter au maximum l’accès aux sites de travail physique, et donc limiter le risque de contagion. Les équipes informatiques ont beaucoup à faire et son très solliciter en ce moment car elles doivent avancer très vite sur l’accessibilité des outils informatiques à distance.

Enfin, pour les salariés dont l’activité serait réduite, je conseille autant que possible de réfléchir à comment avancer sur des sujets de fonds, pour lesquels nous ne prenons pas suffisamment le temps habituellement. Il faut s’adapter, et ici cela signifie réfléchir en dehors de sa zone de confort.

Le télétravail permet-il aux salariés de continuer à s’organiser pour la défense de leurs droits et acquis sociaux ?

Le dialogue social ne doit pas s’arrêter en cette période inédite, bien au contraire. Il ne peut revêtir les mêmes formes qu’avant le confinement mais est essentiel à la prise de décision. Il doit d’ailleurs s’adapter à un rythme de décision rapide et soutenu.

Si les négociations d’accords d’entreprise peuvent être mises en pause en cette période, ce n’est pas le cas s’il y a un accord sur les congés imposés à titre exceptionnel et il faut par exemple prévoir une consultation CSE/CSSCT concernant l’analyse des risques professionnels. Aussi, le plan de reprise de l’activité doit se faire selon moi en lien avec les partenaires sociaux. Le confinement a un impact sur les emplois nécessairement, et il faut travailler main dans la main avec les représentants du personnel pour trouver les meilleures solutions.

À noter que les délégués syndicaux doivent continuer leurs échanges avec les salariés d’autant plus durant cette période. Ils ont pour rôle de faire remonter les situations de souffrance des salariés.

Pour les employeurs qui se posent des questions, parfois techniques, sur les conséquences juridiques du Coronavirus je vous conseille de lire les brèves publiées sur LinkedIn par le cabinet d’avocats Herald

Faut-il d’ores et déjà anticiper le retour au travail physique ?

C'est un élément que les entreprises vont devoir commencer à anticiper. En effet, si beaucoup de salariés ont éprouvé des difficultés à être rapidement confinés, certains observant des phénomènes de décompensation surtout dans un environnement médiatique anxiogène, je pense que malheureusement le retour au travail physique va être difficile.

Alors comment anticiper cela ? En créant par exemple des groupes de discussion et d'expression au retour de confinement, en maintenant des points d'équipe plus réguliers pour la reprise ou encore en faisant le lien avec une ligne d'écoute psychologique si ce n'est pas déjà le cas en interne.

À ce titre, j'ai créé une start-up - heyu - dans le domaine de la formation digitale et de l’ingénierie pédagogique avec deux associés et nous allons dans les prochaines semaines sortir un e-learning pour traiter ce sujet intitulé "Le retour en entreprise suite à une période de confinement". On y retrouvera des clés de gestion du stress, des méthodes pour s'adapter à une reprise progressive du travail physique ou encore des astuces pour gérer les rapports sociaux avec collègues et familles.



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