Homiz, une startup pour favoriser les liens intergénérationnels

Homiz, une startup pour favoriser les liens intergénérationnels

Tout juste diplômé de Sciences Po (promo 19), Benjamin Lévy a lancé la startup Homiz. Cette plateforme permet de mettre en relation des étudiants qui cherchent un logement et des seniors ayant une chambre disponible, contre un loyer modique et/ou des menus services (courses, aide informatique...). Le service est proposé dans toute la France avec un accent sur les villes étudiantes en crise de logement (Paris, Reims, Lille...). La plateforme est aussi disponible en anglais pour les élèves en échange. Benjamin Lévy répond aux questions d’Émile et nous explique les spécificités de Homiz.

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Comment votre parcours universitaire et professionnel vous a-t-il conduit à vous lancer dans une aventure entrepreneuriale ?

Mes années à Sciences Po ont d’abord confirmé mon intérêt pour la chose publique. Que ce soit en classe, notamment pendant ma dernière année de master en Affaires publiques, ou en stage dans le secteur public chez Nova Consulting, j’ai vite compris que les questions sociales, celles qui concernent le plus grand nombre, m’attiraient particulièrement. Dans le même temps, ces années d’études et d’expérimentation ont affirmé mon envie de concret, de terrain, notamment au sein de la startup Culture First ou pendant mon tour de la Nouvelle-Zélande en auto-stop lors de mon échange. C’est d’ailleurs pendant cette année à l’étranger que m’est venue l’idée de Homiz.

Benjamin Lévy, cofondateur de la plateforme de cohabitation intergénérationnelle Homiz (D.R.)

Benjamin Lévy, cofondateur de la plateforme de cohabitation intergénérationnelle Homiz (D.R.)

Racontez-nous cette révélation à l’autre bout du monde.

Pendant mon année d’échange à Melbourne, j’ai choisi de vivre mon premier semestre chez un octogénaire par manque de moyens, car les prix de l’immobilier sont assez exorbitants en Australie. Mais je n'ai pas tardé à me rendre compte que c'était la meilleure chose qui puisse m'arriver là-bas. Cela a non seulement été une formidable façon de découvrir la ville auprès d'un homme qui l'a vue évoluer décennie après décennie, mais aussi d'en apprendre davantage sur la vie en général, au contact d'une génération que je ne côtoie plus ; mes quatre grands-parents étant tous partis.

Depuis, je me suis dit qu'il était absurde que ce genre de cohabitation n'ait pas lieu plus souvent, alors que j'ai souvent entendu mes camarades, français ou étrangers, se plaindre de leurs conditions de logement pendant leurs études. En discutant avec mon frère, passé par HEC et par du conseil en impact social, je me suis rendu compte qu’il était animé par la même intuition d’une complémentarité intergénérationnelle mal exploitée depuis une mission Smart City pour la ville de Toulouse. Au cours de nombreux entretiens, il nous est en effet apparu évident que ce modèle résonnait aussi chez nos aînés, qui ont un logement souvent trop grand pour eux et ont beaucoup à transmettre et à enseigner.

Pouvez-vous nous expliquer le concept de Homiz en quelques lignes ?

La cohabitation intergénérationnelle est un modèle de vivre-ensemble encore largement méconnu : à peine 1500 cohabitations sont organisées chaque année de façon très locale. Or, au vu de l’engorgement des villes et du vieillissement de la population, nous croyons au fort potentiel de développement de ce modèle de vivre-ensemble, aussi vertueux que nécessaire pour la société toute entière. Désireux de généraliser ce modèle, nous avons donc travaillé à l’élaboration d’un service hybride - à la fois digital et humain - pour faciliter l’organisation des cohabitations à distance, et favoriser la rencontre entre nos jeunes et nos aînés. De belles complicités naissent entre ceux qui partagent les mêmes centres d’intérêt, et je serais ravi que l’outil serve également à resserrer les liens intergénérationnels au sein de la communauté des Sciences Po. Permettre aux 1200 étudiants en échange chaque année rue Saint-Guillaume, aux 60% d’admis venant de régions, ou aux 26% d’étudiants boursiers, d’entrer en contact avec leurs aînés parisiens favoriserait non seulement le partage de savoirs et de connaissances au sein de la communauté, encouragerait la mobilité intra et internationale des étudiants et permettrait à ces derniers de se concentrer plus sereinement sur leurs études.

Concrètement, comment cela fonctionne ?

C’est très simple. D’un côté, l’étudiant se présente en vidéo, recherche les cohabitations par ville et par date dans toute la France, ne paie de faibles frais de services (et pas de caution) qu’à la validation de la cohabitation, et peut continuer de bénéficier de l’aide au logement. De l’autre côté, l’aîné (ou un proche) s’inscrit - gratuitement - en ligne ou par téléphone, fixe librement ses conditions d’accueil - petit loyer (dont le paiement est garanti) et/ou services (cours d’informatique, de langues, courses...) - et reçoit des profils détaillés et vérifiés d’étudiants. Enfin, nous générons automatiquement le contrat de cohabitation et accompagnons le binôme tout au long de la cohabitation. En effet, la loi ELAN a donné en 2018 un cadre juridique à cette pratique dans le parc privé comme social, sans besoin de l’accord du bailleur dans le cas où l’aîné serait locataire. Par ailleurs, à l’issue d’une « période d’essai » de quinze jours, chacun dispose d’un préavis d’un mois dans le cas où il souhaiterait mettre fin à la cohabitation, mais ce n’est encore jamais arrivé !

Quand le site a-t-il été lancé ?

Nous avons lancé une version bêta du service auprès d’une population test fin 2019, afin d’affiner le parcours utilisateur, d’obtenir de premiers financements (de la part de mutuelles et de banques publiques) et d’ébaucher de premiers partenariats (avec des acteurs du bien-vieillir, de la jeunesse et du logement comme la MAIF ou La Poste). Puis le lancement du service a eu lieu en février 2020, juste avant le Covid.

« Après le confinement, nos jeunes et nos aînés ont exprimé plus que jamais leur besoin de lien social et de transmission intergénérationnelle. »

Si le confinement a interrompu l’organisation des cohabitations, nous sommes restés tout au long de la période en contact étroit avec nos jeunes et nos aînés, qui ont exprimé plus que jamais leur besoin de lien social et de transmission intergénérationnelle. Témoignant de cet appel pour un nouveau modèle de vivre-ensemble post-covid et un décloisonnement entre générations, la plateforme a dépassé les 1000 inscrits au sortir du confinement.

Quels sont vos projets pour la suite ?

Dans un premier temps, nous comptons multiplier les partenariats avec des acteurs du bien-vieillir, de la jeunesse, de l'insertion, du logement pour étoffer notre écosystème et sensibiliser au modèle de la cohabitation. Ensuite, nous avons en tête plusieurs fonctionnalités supplémentaires pour optimiser la compatibilité au sein des binômes et aider les aînés à définir une juste contrepartie financière selon leur ville, la superficie de leur logement et les services demandées. Enfin, nous souhaitons proposer l’organisation de cohabitations intra-entreprises (entre parents et enfants des salariés d’une même société) aux comités d’entreprises, services RSE et directions RH, et nous aimerions tester cette offre B2B auprès d’entreprises pilotes.



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