[Partenariat] Romain Maulin : "Le droit économique est l’une des matières les plus sensibles à la conjoncture"
Rencontre avec Romain Maulin (promo 08), fondateur du cabinet-boutique Maulin Avocats, qui intervient exclusivement en droit de la concurrence, de la distribution et de la consommation.
Depuis les bancs de la rue Saint-Guillaume jusqu’à la création de votre cabinet, quelles ont été les grandes étapes de votre parcours académique et professionnel ? À partir de quel moment avez-vous souhaité devenir avocat ?
Mon parcours m’a d’abord conduit à fréquenter les bancs de plusieurs universités de droit, celle de Westminster, à Londres, puis à Bordeaux et enfin à Panthéon-Sorbonne, à Paris. J’ai ensuite intégré, en 2007, Sciences Po et sa spécialisation Droit économique, alors dirigée par Marie-Anne Frison-Roche. La vocation pour la profession d’avocat est arrivée assez tardivement, je dirais en quatrième ou cinquième année de droit et certainement grâce aux stages en cabinets que je réalisais entre chaque année universitaire. En 2018, après avoir exercé pendant une dizaine d’années au sein de plusieurs cabinets anglo-saxons, j’ai ressenti le besoin de créer ma propre structure. J’ai donc fondé Maulin Avocats, un cabinet-boutique dédié au droit économique.
Comment la formation à Sciences Po vous a-t-elle aidé et vous aide-t-elle encore dans votre carrière ?
Elle a été déterminante et a constitué une période d’émulation intellectuelle très complémentaire du socle fondamental de connaissances acquis en faculté de droit. L’impact d’une formation à Sciences Po ne s’arrête pas au diplôme : j’ai conservé d’excellentes relations avec mes camarades de promotion, qu’il m’arrive régulièrement de croiser dans le cadre de mon activité. Ces échanges nourrissent ma pratique et me permettent de disposer de contacts précieux et fidèles dans différents secteurs du droit et de l’économie.
Comment est composée l’équipe du cabinet ?
Actuellement, nous sommes six : trois collaborateurs, une stagiaire, une assistante et moi-même, associé. Une équipe restreinte et très soudée dans laquelle chacun apporte son expertise spécifique et sa contribution personnelle. Nous travaillons dans un esprit très horizontal, avec beaucoup d’échanges et une grande réactivité. L’idée est d’allier une grande exigence individuelle à l’esprit collectif.
Quel est le champ d’expertise de Maulin Avocats ?
Le droit économique, tout le droit économique et rien que le droit économique ! Concrètement, nous traitons aussi bien le « grand » droit de la concurrence (antitrust, contrôle des concentrations et abus de position dominante) que les pratiques restrictives de concurrence ou le droit de la distribution.
Et quand un dossier nécessite une expertise complémentaire ou croisée (RGPD, propriété intellectuelle, droit de la santé ou droit pénal) nous faisons appel à un réseau de confrères spécialisés qui partagent nos valeurs.
Nous avons la chance d’être reconnus par le marché comme étant le cabinet-boutique de référence sur ces sujets. Notre structure de coûts et notre indépendance nous permettent en effet de rivaliser avec les cabinets d’affaires anglo-saxons.
Après plus de 15 ans d’expérience en droit de la concurrence, quels sont, selon vous, les grands enjeux de ce secteur aujourd’hui ?
Le droit économique est peut-être, par nature, l’une des matières les plus sensibles à la conjoncture de marché. Les grands enjeux du moment résident principalement dans l’adaptation des concepts historiques du droit économique à la digitalisation de l’économie (plateformes de marché en ligne, big data, intelligence artificielle générative, etc.).
“« Les grands enjeux du moment résident principalement dans l’adaptation des concepts historiques du droit économique à la digitalisation de l’économie. »”
Autres défis majeurs : la transition écologique et l’efficacité des politiques industrielles, qui peuvent susciter des tensions avec le droit de la concurrence. En effet, ces objectifs peuvent amener les entreprises à coopérer au-delà de ce que le droit actuel permet ou conduire à des phénomènes de consolidation économique qui, tout en visant la création de « champions nationaux », doivent respecter les contraintes actuelles du contrôle des concentrations.
Concrètement, sur quels types de cas avez-vous l’habitude d’intervenir ?
Nos interlocuteurs naturels sont l’Autorité de la concurrence (ADLC), la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) ou la Commission européenne (DG Comp).
Nous disposons aussi d’une expérience significative des procédures devant les juridictions de contrôle, notamment dans le cadre de contestations de perquisitions concurrence ou de recours devant la Cour d’appel de Paris contre des décisions de sanction de l’ADLC. Spécificité de notre matière, certaines opérations de M&A [fusion-acquisition, NDLR] ayant des implications transfrontalières, il n’est pas rare que nous coordonnions des procédures avec des confrères de barreaux étrangers, encore dernièrement en Allemagne, aux États-Unis ou en Chine.
Quel est le profil de vos clients ? Est-ce que vous intervenez uniquement auprès d’entreprises ?
Ce sont quasi exclusivement des entreprises, aussi bien des grands groupes industriels à empreinte européenne ou mondiale, des PME/ETI, des FinTechs ou encore des organisations professionnelles, notamment dans les secteurs industriels et technologiques, pharmaceutiques, bancaires, de la grande distribution alimentaire et du luxe, c’est-à-dire, concrètement, les secteurs retenant la plus grande attention des régulateurs. Nous accompagnons également, pro bono, des personnes physiques qui n’ont pas nécessairement de budget juridique spécifique (notamment Pauline Payet, joueuse de tennis professionnelle qui a lancé une académie de tennis) ou des ONG telles que Canopée, engagée pour la protection des forêts.
Votre cabinet est-il à la recherche de nouveaux collaborateurs ? Des étudiants ou alumni en droit de Sciences Po peuvent-ils vous contacter ?
Nous sommes toujours à la recherche de nouveaux talents ambitieux et motivés. Les étudiants ou alumni en droit de Sciences Po sont évidemment les bienvenus et peuvent nous contacter à l’adresse suivante : contact@maulin-avocats.com.
Si vous deviez donner trois conseils pratiques à des étudiants ou de jeunes alumni qui se lancent dans le secteur du droit de la concurrence, quels seraient-ils ?
Ce seraient probablement trois conseils que je retiens de ma formation à Sciences Po, et des divers intervenants que j’ai pu y côtoyer. D’abord, cultiver une curiosité absolue : avocat en droit de la concurrence est un métier tout à fait singulier dont on réalise rapidement que la qualité et la pertinence du conseil apporté au client dépendent largement de la capacité à bien comprendre son écosystème, son modèle économique et son cadre réglementaire spécifique. Pour comprendre ces éléments, la curiosité n’est pas optionnelle.
“« Trois conseils que je retiens de ma formation à Sciences Po : cultiver une curiosité absolue (...) faire preuve de résilience (...) et enfin maîtriser parfaitement l’anglais. »”
Ensuite, faire preuve de résilience : notre travail est axé sur l’anticipation d’éventuelles pratiques anticoncurrentielles qui sont susceptibles d’être reprochées à nos clients, car d’expérience, une fois que l’ADLC ou la DGCCRF se mettent en mouvement – souvent sur la base d’une plainte particulièrement incriminante et documentée –, il devient délicat de les faire complètement changer d’avis et donc d’obtenir un non-lieu.
Enfin, maîtriser parfaitement l’anglais : historiquement, notre spécialité est grandement influencée par l’action des régulateurs et des auteurs américains. Il est donc impératif de pouvoir décrypter, en temps réel, leurs décisions et/ou leurs analyses afin de pouvoir anticiper leur réception en droit européen.
Cet article a initialement été publié dans le numéro 34 d’Émile, paru en novembre 2025.

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